Nous avions demandé en janvier le maintien en Vorschule (équivalent grande section) de notre fille et son inscription en 2023-2024 en 1. Klasse (CP) dans une école avec filière inclusive. Cette école n’était pas notre école de référence mais une école publique plus facilement accessible pour nous. Elle nous avait fait une excellente impression lors de nos rendez-vous avec la directrice.

Nous avions d’abord fait face à un premier refus fin mars (cf. article Sans pause !). Une semaine plus tard, notre seconde demande était refusée (cf. Toujours pas de pause !). Nous avions fait immédiatement appel des deux décisions et appris mi-juin que nos demandes venaient d’être transmises au service juridique de la Schulbehörde, le ministère hambourgeois de l’Éducation (cf. Attendre… se battre !). En effet, en Allemagne, l’éducation dépend du Bundesland et les règles et l’organisation varient selon les régions. Il n’y a donc pas de système national comme en France.

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Cette année, les vacances hambourgeoises commençaient le 6 juillet au soir, il ne nous restait donc pas même un mois pour obtenir une réponse quant à la future scolarité de notre fille. Cette date est arrivée sans réponse, nous sommes partis en vacances quelques jours plus tard… toujours sans savoir le niveau et l’établissement dans lesquels notre fille serait un mois plus tard.

Le 15 juillet, nous avons eu une réponse positive pour le maintien en Vorschule. Un simple mail ! Nous attendons toujours le document officiel, la rentrée scolaire est après-demain. Comment avons-nous réussi ? Il faut être réaliste, mon mari s’est montré déterminé, pugnace et tenace. Il a décortiqué les règlements et la jurisprudence de la Schulbehörde, contacté de nombreuses personnes, argumenté et contre-argumenté avec le responsable du service juridique. Nous avons pris un avocat et prévenu que notre détermination pourrait aller jusqu’au tribunal… tout en sachant que celui-ci n’aurait probablement pas pu statuer avant la rentrée scolaire.

Nous avons sorti un dernier argument : en pleines vacances d’été, ce sera impossible pour l’école de se préparer à accueillir notre fille en prenant en compte sa maladie et son handicap. Or, le droit scolaire (Schulgesetz) de Hambourg établit clairement que tout enfant a le droit à une scolarisation sans discrimination et qu’un enfant porteur de handicap doit recevoir le soutien nécessaire et évoluer dans un environnement scolaire le mettant dans les meilleures conditions pour sa scolarité et son développement social.

Malheureusement, ce n’est pas la réalité. D’après un article de Initiative Gute Inklusion (initiative pour une bonne inclusion), seuls 5,5% des élèves hambourgeois n’obtiennent pas l’école demandée… mais ce chiffre monte à 31% pour les enfants porteurs de handicap. En effet, les frais de transports sont pris en charge par la Schulbehörde pour les enfants porteurs de handicap, si ceux-ci ne peuvent pas se rendre seuls à leur école et si leurs parents ne sont pas non plus en capacité de les emmener (pour des raisons personnelles ou professionnelles). La Schulbehörde cherche donc à scolariser les enfants porteurs de handicap le plus près possible de leur domicile, sans se demander si cette situation est forcément la meilleure pour l’enfant.

J’aurais envie de dire que ce sont nos arguments pertinents et les rapports des thérapeutes connaissant notre fille qui ont pesé dans la décision. Mais je pense malheureusement que c’est bien davantage la présence d’un avocat et la détermination sans faille de mon mari qui ont emporté la décision. Notre fille reste donc dans sa crèche un an de plus, dans un environnement où elle est en toute confiance et où elle pourra se préparer encore mieux à son entrée en 1. Klasse en août 2023. D’ailleurs, l’école que nous souhaitions nous a été aussi accordée (de manière encore non officielle).

C’est un grand soulagement, j’ai vraiment eu l’impression qu’un lourd poids disparaissait de mes épaules quand mon mari m’a annoncé la bonne nouvelle. Mais un goût amer reste, celui d’avoir dû autant se battre pour juste permettre à notre fille d’avoir plus de chance d’apprendre à lire et à écrire. Je pense aussi beaucoup à tous les parents dans la même situation que nous mais n’ayant pas les moyens culturels et financiers de faire appel des décisions et de contre-argumenter en s’appuyant sur le droit allemand.

Photographie de couverture : cette belle porte barrée d’obstacles est située dans les ruines de l’abbaye Saint-Laurent-lès-Cosne, à Saint-Laurent-L’Abbaye dans la Nièvre.