La rentrée vient d’avoir lieu en France, pour les petits et grands écoliers hambourgeois, elle a eu lieu il y a déjà presque un mois. La semaine dernière, je vous ai expliqué le fonctionnement de la Grundschule, l’école primaire et je vais maintenant vous présenter le secondaire à Hambourg.
Pour ceux qui n’auraient pas lu mon premier article sur le primaire, il n’y a pas vraiment un système scolaire allemand car l’éducation dépend des Bundesländer et donc les programmes mais aussi la structure varient d’une région à l’autre.
L’Empfehlung en fin de 4. Klasse
A la fin de la 4. Klasse (CM1), les enseignants vont se prononcer sur l’orientation de chaque élève. En effet, il n’y a pas un collège unique, comme en France, mais deux structures différentes : la Stadtteilschule et le Gymnasium, le second étant plus prestigieux que la première. L’avis est donné de façon indicative, selon les résultats de l’enfant. Les parents ne sont pas obligés de le suivre et peuvent décider d’inscrire leur enfant en Gymnasium, même s’il n’en a pas eu la recommandation. Mais il faut être réaliste, si l’enfant a eu une Empfehlung pour le Gymnasium, les parents vont rarement décider d’inscrire leur enfant en Stadtteilschule.
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La journée d’école dans le secondaire
Dans le secondaire, les enfants ont cours entre 8h et 16h pour les longues journées. Au moins deux fois par semaine, les cours se terminent à 13h30. Pour les grandes classes (à partir de l’Oberstufe, c’est-à-dire la première et la terminale), les cours peuvent avoir lieu jusqu’à 16h45 (souvent pour des options facultatives). Une heure de cours dure 45 minutes et l’emploi du temps comporte principalement des heures doubles (donc 1h30 de cours). Les matières enseignées sont les mêmes qu’en France, mais les élèves allemands ont en plus des cours de religion. Contrairement à la France, il y a une hiérarchisation officielle entre les matières principales (allemand, maths, anglais) et les matières secondaires (toutes les autres). Les enseignants ont d’ailleurs deux matières qu’ils sont libres de combiner au début de leurs études, même s’il est plus stratégique d’avoir une matière principale et une matière secondaire pour être sûr d’avoir un temps plein sur un seul établissement. On peut ainsi rencontrer des profs de religion et sport, d’histoire et chimie, d’arts plastiques et de biologie, etc. Ici, l’histoire et la géographie ne vont pas ensemble. Le prof de géo est souvent aussi prof de biologie et le prof d’histoire est plutôt prof d’allemand ou d’une langue étrangère.
Parmi les langues vivantes proposées, l’anglais est presque toujours la première langue étrangère apprise. En seconde langue, les élèves ont généralement le choix entre français, espagnol et latin. En effet, le latin n’est pas une option en plus des deux langues vivantes, c’est une langue enseignée au même titre que l’anglais et le français par exemple. Une différence majeure entre le système français et le système allemand : l’oral y joue un rôle prépondérant. Chaque matière est évaluée à l’écrit et à l’oral. La note d’oral vaut entre 60 et 70% de la moyenne finale et le nombre de contrôles est limité et codifié. Par exemple, pour une matière enseignée 4h par semaine, il n’y aura que deux contrôles dans tout le semestre et les dates de ceux-ci sont planifiées dès les premières semaines d’école.
Dernière grosse différence : la notation. Les notes vont de 1 à 6 ; 1 étant la meilleure note : 1, 1, 1-, 2+, 2, 2-, etc. La moyenne est fixée à 4-. En Oberstufe (première et terminale), il y a un second système de notation (en parallèle) : de 0 à 15 points (15 étant la meilleure note), la moyenne est elle fixée à 5.
La Stadtteilschule
C’est une particularité du système hambourgeois, même si d’autres Bundesländer ont le même type d’établissement mais avec un autre nom. On va dans la Stadtteilschule de la 5. Klasse (CM2) à la 13. Klasse (terminale). Les élèves peuvent y passer des diplômes intermédiaires : l’Erster Bildungsabschluss (en 9. Klasse, soit la 3ème), le Mittlerer Bildungsabschluss (en 10. Klasse, soit la seconde) et l’Abitur (baccalauréat en 12ème et 13ème Klasse, soit la première et la terminale mais après une scolarité durant une année de plus qu’en Gymnasium ou en France). Après la 9. Klasse ou la 10. Klasse (3ème ou seconde), il y a la possibilité de quitter l’école pour commencer une formation professionnalisante en Berufschule (équivalent de lycée pro).
En Stadtteilschule, la scolarité dure neuf ans jusqu’à l’Abitur (bac) alors qu’on va le préparer en huit ans au Gymnasium. Les jeunes bacheliers peuvent ensuite faire des études à l’université, dans une Hochschule ou suivre des cursus professionnalisants (type BTS, DUT, IUT).
Le Gymnasium
Le Gymnasium est vu et assumé comme une filière plus prestigieuse que la Stadtteilschule, destinée à des élèves ayant de meilleurs résultats. C’est la voie conseillée pour aller ensuite à l’université car c’est uniquement dans les Gymnasien que l’on va retrouver les bacs les plus reconnus comme par exemple l’Abibac qui permet d’obtenir un baccalauréat français en plus de l’Abitur allemand. On y reste de la 5. Klasse à la 12. Klasse (terminale). Les élèves y passent le ZÜP (Zentrale Überprüfung) en fin de 10. Klasse, c’est un peu l’équivalent du brevet. Ils sont évalués à l’écrit en allemand, en maths et en langue étrangère (l’anglais en général). Ils peuvent ensuite préparer l’Abitur (bac) pendant les années de 11ème (première) et de 12ème (terminale). Il n’y a pas un système de filières communes à tous les Gymnasien. Chaque collège-lycée propose des Profils comme par exemple « Back to the future » avec l’anglais, l’histoire et l’art (en anglais) en matières déterminantes ou « System-Erde-Mensch » avec la biologie, la géographie et l’économie en matières déterminantes, « Sport und Fitness » avec le sport, la biologie et la géographie en matières déterminantes, etc.
Un système hermétique ?
Les élèves entrés en Stadtteilschule sont destinés à y rester jusqu’aux diplômes intermédiaires pour ceux suivant ensuite un cursus professionnalisant ou au bac pour les autres. Les meilleurs ont la possibilité de rejoindre le Gymnasium uniquement pour l’entrée en Oberstufe (11. Klasse) afin d’y préparer un bac qui ne serait pas proposé dans leur établissement. Cela reste cependant rare, les élèves de Stadtteilschule ayant tendance à y rester.
Côté Gymnasium, une sélection est faite en fin de 6. et de 10. Klasse. En 6., les élèves les plus faibles (ayant au moins un « 5 » dans une matière principale, ce qui correspond à 07 ou 08/20) sont exclus du Gymnasium et orientés en Stadtteilschule. Le redoublement est exceptionnel et autorisé seulement pour des élèves ayant eu de gros problèmes de santé, familiaux, etc. En moyenne, entre un quart et un tiers des élèves d’une classe de 6. Klasse partent en Stadtteilschule. On retrouve la même sélection en fin de 10., les élèves les plus faibles n’étant pas autorisés à poursuivre leur scolarité dans le Gymnasium.
Honnêtement, je trouve le système très sélectif et plutôt élitiste, même si les enfants sont bien encadrés, soutenus et encouragés pendant les années de 5. et de 6. Klasse. A 10-12 ans, beaucoup d’enfants ne sont pas encore très mûrs et ne vont souvent pas travailler une matière s’ils n’aiment pas le prof. Être exclu de son établissement, perdre ses amis et ses repères parce qu’on a eu une mauvaise moyenne annuelle en maths, en allemand ou en anglais en 6ème me semble violent pour l’enfant.
Le système scolaire allemand est souvent donné en exemple dans les média français. La bivalence des enseignants, le fait que le remplacement des enseignants absents soit assuré par les enseignants de l’établissement, l’autonomie accordée aux enfants sont mis en exergue. Mais les points faibles de ce système sont méconnus et pour moi, cette sélection en fin de 4. et de 6. en est clairement un.
Tu vas penser que je radote, mais j’aime beaucoup ces articles de présentation des pratiques allemandes ou hambourgeoises dans le cas présent ! Merci à toi pour tous ces partages !
Mais moi j’aime bien quand tu radotes si c’est pour me dire que tu aimes beaucoup mes articles ! 😉
Je suis contente que mes partages sur la vie en Allemagne t’intéressent.
Merci pour cet article! J’ai moi-même passé un bout de ma terminale et une année Erasmus en Allemagne et suis toujours étonnée de ce mélange entre ouverture (flexibilité dans les choix de cours, enseignants à 2 matières, prépondérance de l’oral etc) et élitisme.
Merci beaucoup Lucie pour le commentaire ! C’est tout à fait ça, à la fois une grande ouverture et un élitisme reproduisant les inégalités sociales.
Je l’attendais cet article très intéressant ! En effet, les médias mettent ce qu’ils souhaitent en avant, comme toujours… Mon avis est assez mitigé, comme le tien, le côté élitiste me déplait, je n’aime pas trop les systèmes qui catégorisent d’emblée certains enfants…
J’ai vraiment été choquée quand j’ai appris que ces sélections étaient faites aussi tôt. Merci beaucoup pour ton commentaire !
Ah l’Abibac, les cours de religion, ça me rappelle des souvenirs 😉 . Je trouve que le système français est aussi assez inégalitaire, mais c’est plus « caché ». A Sciences Po, je n’ai pas vraiment vu d’enfants d’ouvriers et très peu de classe intermédiaire. Par contre, pour mon conjoint qui a commencé au lycée professionnel, c’est exactement l’inverse.
La sélection se fait au moment du brevet, mais malheureusement, beaucoup de cartes sont déjà jouées d’avance.
J’aurais bien aimé passer l’Abibac mais ça n’existait pas à l’époque dans ma campagne… Le système français est aussi inégalitaire, tu as raison. Quand j’étais à la Sorbonne, j’avais un peu le sentiment d’être la seule étudiante à être boursière à l’échelon maximum et à venir d’une famille ouvrière… J’étais à Paris IV en plus, le temple bourgeois du conservatisme. 😉
C’est super interessant ! 🙂 J’ai beau connaître assez bien le système allemand, l’organisation des Bundesländer fait que on apprend toujours des nouvelles choses 🙂
Merci beaucoup pour ton commentaire ! Chaque Bundesland a ses spécificités et ses règles et c’est parfois déstabilisant quand on vient d’un pays centralisé comme la France.