Cette semaine qui s’achève a été un peu différente des précédentes car je suis allée vendredi au travail. Je n’y étais pas allée depuis plus d’un mois. Nous étions quelques collègues à être présents pour assurer des rendez-vous importants. Nous étions répartis en deux équipes, celle du matin et celle de l’après-midi pour éviter d’être en contact avec trop de personnes.

Jeudi soir, j’ai donc dû mettre mon réveil, ce qui n’était pas arrivé depuis le 16 mars et réfléchir aux éventuels embouteillages, peut-être disparus depuis la mise au ralenti du pays. Vendredi matin, les deux grands se sont réveillés en même temps que moi et étaient un peu stressés, la cadette a même pleuré. C’est vrai qu’ils ne sont plus habitués à me voir aller au travail depuis la fin février. Désormais, je vais au travail… quand je m’assieds devant mon ordinateur.

Le trajet est rapide : 35 minutes alors qu’il peut durer… plus d’une heure si je pars à 08h00. Le parking des employés est par contre fermé, une affiche précisant que l’accès est interdit pour éviter tout rassemblement. Certains collègues portent un masque. J’ai aussi pris le mien, ne sachant pas si le port est obligatoire ou non. Je suis un peu en avance et attends, seule, dans notre salle de pause, où tous les messages affichés datent de février, comme si les mois de mars et d’avril avaient été aspirés par une faille spatio-temporelle. Je repense au livre Le mur invisible (Die Wand), publié en 1963 par l’écrivaine autrichienne Marlen Haushofer. Dans ce roman, la narratrice se réveillait un matin, probable unique survivante humaine à une catastrophe mondiale ayant eu lieu pendant son sommeil.

Je sais, mon imagination exagère un peu. Mais ces bâtiments fermés et ces couloirs vides autour de moi sont étranges dans cet espace habituellement plein de vie. Ma chef, masquée avec son foulard, entre, suivie par un collègue. Nous sommes un peu à l’étroit, entre les tables et les chaises et je recule d’un pas. L’ambiance est légèrement tendue. Heureusement, mon collègue lui demande si elle a prévu de braquer une banque. C’est vrai qu’avec son foulard remonté jusque sous les yeux, elle fait penser aux brigands des westerns.

Nous parlons bien sûr de la situation actuelle et de la réouverture des écoles, en attendant d’être tous présents. A priori, aucun collègue n’a attrapé le covid 19, ce qui nous soulage car certains ont une santé fragile. Nous nous mettons ensuite rapidement au travail, personne n’a de toute façon envie de boire un café et de bavarder. Un collègue précise qu’il a le rhume des foins et que si jamais il éternue, ça sera seulement à cause de ses allergies. Tout le monde sourit et essaie de reculer discrètement. Des petites bouteilles de gel hydroalcoolique sont à notre disposition et les consignes d’aérer fréquemment les pièces nous ont été répétées par la chef.

Malgré l’ambiance détendue, la tension reste palpable. On entend les oiseaux chanter dans les espaces verts environnants, profitant de la tranquillité régnant dans les lieux depuis plus d’un mois. J’y retournerai un après-midi la semaine prochaine. Je suis à la fois contente de retrouver un semblant de normalité mais cette ambiance si silencieuse et vide n’est, en fait, pas le quotidien que je connais au travail.

J’ai poursuivi cette semaine différente… en prenant le bus. Je ne l’avais en effet pas pris depuis deux mois. Depuis un mois et demi, je ne suis pas sortie de notre quartier à part donc pour aller deux fois au travail et pour les quelques sorties que nous avons faites dans des espaces naturels protégés à Hambourg. Dans le bus, cet autocollant avait été collé sur une fenêtre sur deux pour rappeler que le port du masque sera obligatoire aux arrêts et dans les transports en commun à partir du lundi 27. La rue piétonne était assez fréquentée et beaucoup de personnes étaient assises sur les bancs avec leur café (à emporter). La moitié portait des masques, moi aussi d’ailleurs. J’ai réglé rapidement la course que j’avais à faire, ayant hâte de rentrer chez moi malgré le soleil.

La semaine qui commence va être décisive à Hambourg car les premières grandes mesures de déconfinement sont mises en œuvre. Les établissements du secondaire vont en effet rouvrir mais seulement pour certaines classes et dans des conditions d’hygiène et de distanciation des élèves et des enseignants bien précises. Davantage de magasins vont aussi avoir le droit de rouvrir leurs portes. Espérons que les conséquences soient positives, tant pour l’économie et le moral des habitants que pour la lutte contre le covid 19.

Bon courage à vous aussi et prenez bien soin de vous !

Photographie prise à La Charité-sur-Loire (Nièvre)

Autres chroniques :

Coronavirus sans Bavière : chronique du 10 avril

Coronavirus et anniversaire : chronique du 31 mars

Coronavirus et Angela : chronique du 23 mars

Coronavirus et inspiration : chronique de la journée du 16 mars

Dans l’attente (13 mars)