Je participe au rv #Histoires Expatriées du mois d’octobre 2020. Ce rv est organisé par le blog L’occhio di Lucie et ce thème, »toute seule », a été proposé par Eva, une Française vivant au Japon et dont le blog s’appelle Frenchy nippon.
Toute seule ! Je le suis au travail dans la mesure où je suis la seule non-Allemande et donc aussi la seule Française parmi tous mes collègues. J’ai des collègues francophiles et même parfaitement francophones… mais ils sont allemands. Petite nouveauté depuis quelques semaines : l’un des chefs vient d’arriver sur le poste, est marié à une Française et a longtemps vécu en France. Nous parlons en français (à sa demande), comme je le fais avec les collègues francophones le souhaitant mais je sais que cela est mal vu. Des collègues n’apprécient pas que je garde ma spécificité de Française et le voit, plus ou moins, comme un refus d’intégration. J’ai longtemps hésité mais j’ai décidé de les laisser parler, je suis française, cela s’entend quand je parle et je n’ai pas à le cacher. Mais je reste bien sûr polie et ne parle pas en français si des collègues ne le comprenant pas sont à proximité directe. Je n’ai pas non plus la nationalité allemande, je n’en ressens pas l’envie pour le moment. Cela surprend parfois car je suis en Allemagne depuis plus de dix ans. J’y songe un peu au moment des élections au Bundestag car je ne peux pas participer mais, malgré tout l’attachement que j’ai pour l’Allemagne, je ne me sens pas allemande. On verra dans quelques années si mon point de vue a changé ou pas.
Je suis aussi toute seule dans ma famille à ne pas être allemande, à ne pas vivre dans mon pays. Mes enfants sont nés ici, ils sont franco-allemands et leurs langues maternelles sont le français autant que l’allemand. J’ai été longtemps inquiète que leur lien à la France et à la langue française soit moins fort que celui à l’Allemagne et à la langue allemande. Mais finalement, l’équilibre est présent et ils passent sans souci d’une langue à l’autre. J’ai eu, un temps, une forte nostalgie et l’envie de rentrer en France mais notre situation familiale particulière fait que Hambourg reste pour l’instant la meilleure option pour nous.
Toute seule, j’aime aussi l’être en semaine pour écouter le silence et profiter du calme, afin de mieux réfléchir et de travailler plus efficacement. Je travaille deux jours par semaine à la maison tandis que les enfants sont à la crèche et à l’école et c’est reposant.
Mais au final, je ne me sens pas du tout isolée, j’ai des amis tant français ou francophones qu’allemands ou d’autres nationalités. Je me sens bien intégrée en Allemagne, notamment du fait de ma connaissance de la langue et de la culture allemandes.
Autres participations
Photographie de couverture : un canard sur la Spree gelée, au niveau du château de Charlottenburg à Berlin
J’apprécie ce compte rendu du sentiment d’une expatriée
Cela nous rend compte de la façon dont on est perçu outre Rhin
Moi qui ai des attaches familiales en Italie et en France, j’ai longtemps été curieuse sur mes deux origines….
Globalement, en tant que Français en Allemagne, on bénéficie d’un a priori positif… mais certains de mes collègues sont bornés voire un peu racistes. Cela fait plus de dix ans que je les côtoie, ils ne changeront jamais alors je les laisse parler.
C’est dommage qu’il ne soit pas apprécié le fait que tu parles français avec des collègues, surtout s’ils le réclament ! Moi je sais que ça me faisait très plaisir de parler ma langue de temps en temps.. Au contraire d’un manque d’envie de s’intégrer je trouve que c’est plutôt la possibilité d’être valoriser dans sa différence et ce qu’elle apporte aux autres 🐸
Le fait que je sois française est très apprécié dans mon travail car ça a été un argument de poids dans mon recrutement, le fait d’avoir une native speaker, quelqu’un qui connaît vraiment la culture française. Mais pour certains collègues, j’ai l’impression que je devrais le cacher dès qu’on sort de ce que j’ai à faire pour le travail.
Comme je te comprends… Je travaille dans une entreprise allemande d’environ 80 personnes, avec 2 collègues français. Je parle donc français avec les Français, et allemand avec les autres, ou quand d’autres écoutent (ce qui me paraît à première vue logique).
Or, un jour que j’étais seule avec mon collègue français dans la cuisine à papoter, une collègue passe par là. Comme elle ne faisait que passer prendre quelque chose, on continue notre conversation en français. Et là elle nous coupe pour nous expliquer que « c’est pas poli de parler dans une langue étrangère, parce qu’alors les autres ne peuvent pas s’immiscer dans la conversation. » C’est vrai qu’à l’inverse c’est tout à fait poli de me couper la parole pour réclamer le droit de s’immiscer dans notre conversation (d’autant qu’on parlait de choses qui ne la concernent absolument pas et qu’en arrivant au milieu de la conversation, même en allemand, elle n’aurait rien compris).
On a ensuite eu, lors des entretiens annuels, la remarque: « il paraît que vous parlez trop en français entre vous à la pause déj’ et que les autres se sentent exclus ». Nous sommes 3 et nous excluons 75 personnes, intéressant.
Je pense que les gens ont un peu « peur » quand ils entendent une langue étrangère, car ils croient qu’on s’en sert pour les critiquer sans être compris. Alors que non, je me sers du français pour parler normalement, tout comme de l’allemand. Et je trouve aberrant de me forcer à parler allemand avec des Français.
Nous sommes depuis un peu tiraillés entre ces dénonciations « anonymes » et les remarques très positives en mode « j’adooore vous entendre parler français, ça met du soleil dans ma journée!! » J’ai fini par faire comme toi : laisser parler.
J’ai eu le même genre de réflexions en entretien-bilan. Les collègues ne parlant pas français se sentent exclus quand je parle à mes collègues francophones, voire se sentent envahis par le français. Bref, je suis la seule Française, il y cinq collègues avec qui je parle français mais la soixantaine de collègues restant se sentent mal à l’aise et exclus… Nous avons eu pendant six mois une stagiaire française (il y a quelques années) et des collègues étaient venus nous conseiller de nous parler en allemand pour nous intégrer. Des fois, j’ai envie de tous les envoyer bosser un an en France pour qu’ils comprennent un peu plus et qu’ils arrêtent de me reprocher d’être trop française et ne pas vouloir m’intégrer.
Je parle couramment allemand, je connais très bien l’histoire, la géographie et l’art allemands (probablement mieux que beaucoup d’Allemands), mon mari est allemand et on me reproche de ne pas vouloir m’intégrer ?
Je suis d’accord avec toi, il y a une part de paranoïa que j’ai aussi connu avec des mamans allemandes qui me reprochaient de parler à mes enfants en français et qu’elles ne comprennaient pas ce que je disais. Comme si j’allais dire « regarde la maman-là comme elle est moche et bête ! » à mon bébé !
Merci de ce retour d’expérience, navrée d’apprendre que cela se passe ainsi à ton travail, ca ne doit pas donner envie de s’y rendre certains jours :/
Je ne comprends pas la réaction de tes collègues, car je ne vois pas ou est le mal. Quand j’étais service, le chef et un autre serveur étaient aussi français, on parlait en français devant le staff japonais. Eux osent parler d’intégration, alors tu parles leur langue, mais eux cote acceuil et confiance, c’est à revoir! Je trouve egalement cela ridicule de devoir parler dans une autre langue à ses compatriotes si vous êtes entre vous.
Les gens sont paranoïaques, ils ont peur qu’on parle en mal d’eux si on parle une langue qu’ils ne comprennent pas. J’ai même eu la réflexion par rapport à mes enfants. Franchement, toute ma famille est en France, nous habitons en Allemagne et si je ne parle en français à mes enfants que quand il n’y a personne autour de nous, ils ne risquent pas d’être bilingues. On m’a même demandé pourquoi je ne parlais pas allemand à mes enfants et quand je leur ai demandé s’ils trouvaient ça normal et spontané de parler dans une langue étrangère à ses propres enfants, ils étaient énervés. Bref, c’est une petite minorité qui a un esprit aussi fermé mais cela suffit pour créer un malaise durable.