Nevers s’est construite sur une petite butte dominant le confluent de la Nièvre et de la Loire. Habitée dès l’époque romaine, la ville est évangélisée au IIIe siècle et devient un évêché au début du VIe siècle. L’histoire de la cathédrale commence au VIe siècle, se développe avec une architecture romane puis gothique et intègre l’art contemporain depuis les années 1970 dans un grand projet de vitraux contemporains.

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Les premières cathédrales

L’emplacement de la cathédrale a d’abord accueilli un temple romain dédié à Janus. La première cathédrale, vraisemblablement consacrée à Saint Gervais et Saint Protais, est construite au début du VIe siècle. On sait peu de choses sur ce bâtiment mis à part que le chœur était orienté à l’ouest. La majorité des églises est orientée, c’est-à-dire que le chœur est tourné vers l’orient (l’est). Cette particularité est peut-être liée à la configuration géographique des lieux (murailles de la ville à l’est, cœur de la ville à l’ouest).

Mais le plan de ce premier bâtiment n’est pas connu. Seuls des vestiges du baptistère ont été conservés. En effet, celui-ci avait été comblé et recouvert au XIIIe siècle puis oublié. Ce sont les fouilles archéologiques entreprises en 1947 et 1949-1950 dans une cathédrale en partie détruite par le bombardement du 16 juillet 1944 qui ont permis de le dégager. Il est accessible par le caveau des évêques.

Plus d’informations dans cet article contemporain des fouilles

Le VIIIe siècle est marqué par les conflits, la première cathédrale est très dégradée. Saint Jérôme, évêque de Nevers de 800 à 816, envisage donc de la reconstruire dès le début de son épiscopat. Selon la légende, Charlemagne aurait alors réuni tous les évêques de son royaume et leur aurait notamment raconté un songe qui le préoccupait. Il avait rêvé qu’il était dans une forêt pour chasser quand tout à coup un sanglier furieux fonça sur lui. Heureusement, un enfant nu apparut à côté de lui et lui promit de le sauver s’il lui donnait un voile pour se couvrir. L’enfant chevaucha le sanglier et le dirigea vers Charlemagne qui réussit à le tuer de sa lance. Pour Saint Jérôme, le songe était clair, l’enfant était Saint Cyr qui demandait à ce qu’un toit lui soit donné : une cathédrale qui lui soit consacrée dans sa ville. Charlemagne approuva et donna à Nevers des terres et la somme d’argent nécessaire pour construire une cathédrale consacrée à Saint Cyr et à sa mère, Sainte Julitte. Les reliques de Saint Cyr et de Sainte Julitte furent amenées dans la cathédrale aux IXe et Xe siècles.

Cette nouvelle cathédrale est malheureusement détruite par un incendie en 908. L’évêque Atton (906-914) la fait reconstruire en une cathédrale préromane de très grandes dimensions mais cette dernière subit aussi des incendies en 953 et en 1028. Une cathédrale romane est reconstruite et consacrée en 1058… mais elle est dévastée par un incendie en 1211.

Restitution probable de la cathédrale romane. Source
En couleurs foncées, existant. En couleurs claires, restitué. Source

Le chœur et une partie du transept ont, heureusement, été moins touchés et ont pu être sauvegardés. Mais la façade et le portail sont détruits. Les parties conservées sont donc romanes tandis que les parties reconstruites sont gothiques. D’autres incendies en 1228 et 1308 endommagent la nouvelle construction et donnent lieu à de nouveaux travaux au début du XIVe siècle, en gothique rayonnant. La ville s’étant agrandie, les murailles ont été repoussées et l’église peut occuper l’espace disponible. Un chœur gothique orienté à l’est est construit sur l’emplacement de l’ancien baptistère et de la chapelle Saint-Jean.

On voit bien ici les arcs romans surmontés d’un arc gothique et le vestige roman intégré dans la construction gothique.

Deux chœurs pour une seule église

C’est la grande particularité de l’église de Nevers : deux chœurs se font face, l’un roman et l’autre gothique.

VItraux de Raoul Ubac

Le chœur roman est caractérisé par une voûte en cul-de-four, c’est-à-dire en forme de quart de sphère. Elle couvre l’abside et est recouverte d’une fresque montrant le Christ en gloire, bénissant de la main droite et tenant le Livre de la main gauche. Il est entouré de deux mandorles. Ces fresques de la seconde moitié du XIIe siècle ont été badigeonnées au XVIIIe siècle, redécouvertes à la fin du XIXe siècle et restaurées à la fin du XXe siècle.

Le chœur roman surmonte une crypte (XIe siècle) dans laquelle on peut admirer une Mise au tombeau du XVe siècle. Elle est plutôt claire et aérée, ce qui est probablement dû aux remaniements qu’elle a connus.

Vitrail de Gottfried Honegger

Le chœur gothique a été construit entre le XIIIe et le début du XVe siècle, le chantier ayant été arrêté et repris après les différents incendies. Il n’est pas tout à fait dans l’axe du choeur roman et du transept, étant légèrement dévié vers le sud. Les chapelles rayonnantes, entre leurs parties basses et leurs parties hautes, permettent de voir l’évolution de l’art gothique. Les parties supérieures sont plus ouvragées et légères. Les vitraux formaient un ensemble allant du XIVe au XIXe siècle, sans trace des vitraux antérieurs.

La tour Bohier

Au début du XIVe siècle, une tour commence à être construite sur le flanc sud de la cathédrale, à proximité du chœur roman. La construction n’est pas poursuivie après la réalisation de la partie inférieure. C’est l’évêque Jean Bohier qui relance la construction en 1509, un après avoir obtenu l’évêché de Nevers. Jean Bohier décède en 1512, la tour Bohier est achevée en 1528.

On voit bien la différence entre la partie XIVe siècle, plus austère, et la partie du XVIe siècle, très ouvragée et décorée de 42 statues monumentales (mesurant entre 2,80 et 3,20m). Cet été, l’association Regards sur la Cathédrale propose de monter à son sommet trois fois par semaine. Vous trouverez toutes les informations sur ces visites dans cet article du Journal du Centre.

J’ai toujours pensé que l’accès à la tour se faisait par le joli escalier ouvragé que l’on aperçoit sur le flanc sud, dans la partie romane. En fait, il se fait soit par l’extérieur, soit par une petite porte dissimulée dans le pilier de la tour. La montée se fait doucement, dans un bel escalier de pierre. Le guide nous a prévenu que nous devrons peut-être faire attention à un nid de pigeons sur une marche… mais les petits avaient déjà eu l’âge de s’envoler.

Nous arrivons dans une première salle qui sert de musée lapidaire où l’on retrouve des statues et des bas-reliefs déposés.

On aperçoit aussi une petite porte donnant sur la nef. C’était là où se tenait le bedeau pour suivre la messe et savoir à quel moment il fallait sonner les cloches.

On monte ensuite à l’étage supérieur. Nous sommes juste en-dessous des cloches et l’espace vide par lequel elles ont été montées.

L’ascension se poursuit et on arrive enfin à la plateforme située à 52m de hauteur et proposant une vue panoramique sur Nevers et la Loire. Je n’étais jamais montée en haut de la tour Bohier et j’étais vraiment très heureuse de la découvrir et de voir Nevers d’en haut. J’y suis allée avec mes deux aînés (8 et 11 ans) mais la visite aurait tout à fait été accessible pour la petite (6 ans).

Les vitraux contemporains

Comme vous avez pu le voir sur les photographies de l’église, les vitraux sont contemporains. En effet, le 16 juillet 1944, en pleine nuit, Nevers a été bombardée par l’aviation britannique. Les 500 tonnes de bombes larguées doivent détruire la gare et les voies ferrées. Les objectifs sont atteints mais malheureusement, le balisage étant défaillant, des quartiers de Nevers et la cathédrale sont aussi bombardés. 163 civils meurent pendant cette nuit et le choeur gothique de la cathédrale est dévasté. Les jours et les semaines suivantes, d’autres bombes explosent car certaines avaient un dispositif de retardement.

Source

La reconstruction à l’identique de la cathédrale est achevée dans les années 1960, les vitraux sont remplacés temporairement par du verre incolore. La question des vitraux s’est déjà posée pour la cathédrale de Metz où, finalement, les vitraux détruits ont été remplacés par des vitraux contemporains. La commande publique des vitraux de Nevers a lieu en 1976, les derniers vitraux seront posés en 2009. Plus de 1052m² de vitraux ont été commandés à des artistes contemporains pour un montant total de 7 millions d’euros.

Le choix des artistes, les projets et le coût ont beaucoup fait débat. On reproche à certains vitraux des motifs non religieux ou trop abstraits, on entend parfois que l’ensemble n’a pas de cohérence mais le résultat final est magnifique dans sa diversité, son inspiration et ses couleurs.

Vitraux de Gottfried Honegger
Vitraux de Jean-Michel Alberola

Des photographies de tous les vitraux sont visibles sur ce blog d’un passionné de vitraux.

La cathédrale de Nevers est un bâtiment fascinant où l’on côtoie mille ans d’art et d’architecture en un seul lieu. Sa visite, que vous soyez un habitué de Nevers ou un néophyte, est toujours intéressante et reflète un millénaire d’histoire de Nevers.