Je participe de nouveau au rv #Histoires Expatriées, organisé par le blog L’occhio di Lucie. Ce thème, « Suis-je un(e) expat’ ?, a été proposé par la marraine du mois de décembre, Lucie qui est aussi la marraine du rv Histoires expatriées.

C’est une question que je me pose déjà depuis longtemps. Quel est mon statut personnel ? Comment pourrais-je définir plus simplement ma situation de Française mariée à un Allemand rencontré en France et venue s’installer il y a dix ans en Allemagne ? Quelle est d’ailleurs ma situation actuelle ?

Là où je vis

Il y a dix ans, j’ai rejoint à Hambourg, après une année de relation à distance, mon amoureux rencontré à Paris, ce jeune Allemand venu y faire une année Erasmus. Il devait finir ses études en Allemagne (il aurait quasiment dû reprendre à zéro en France), je travaillais déjà et savais que je n’aurais pas trop de difficultés à y trouver du travail dans mon domaine. J’ai donc préparé mon déménagement et mon installation à Hambourg et ai rapidement trouvé du travail. Nous partions sur une installation temporaire longue (dix ans), le temps qu’il finisse ses études et ait une première expérience professionnelle avant de venir s’installer à Strasbourg. Le compromis me semblait idéal, il aurait pu travailler en Allemagne et moi en France. Strasbourg est vraiment une ville agréable et dynamique. Strasbourg nous aurait permis d’être plus à équidistance de nos familles, entre Hambourg, la Bavière et la Nièvre. Mais ce projet a été abandonné depuis que nous avons appris que l’un de nos enfants souffrait d’une maladie très rare. La prise en charge, le réseau que nous avons ici sont les meilleurs alliés pour son développement Nous allons donc rester encore au moins dix ans ici ou peut-être même pour toujours.

Suis-je une expatriée ?

Si l’on prend la définition du site service-public.fr, « le statut de salarié expatrié concerne tout salarié amené à travailler à l’étranger pour une mission d’au moins 3 mois. Le salarié expatrié n’a plus de lien de subordination avec l’entreprise d’origine installée en France. Il est affilié à la protection sociale du pays où il part travailler. » A cette définition, je rajouterai que l’expatrié vient d’un pays occidental, riche et a, la plupart du temps une fonction valorisée dans l’entreprise, voire une fonction de direction. Cela fait partie des préjugés.

Ma situation correspond tout à fait à cette définition simple. Mais je ne suis pas une salariée expatriée car j’ai quitté mon emploi en France et en ai trouvé un en Allemagne par mes seules démarches. A mon travail, je suis considérée comme mes collègues allemands, sans différence de statut. Je ne suis pas affiliée à la Caisse des Français de l’Étranger et je cotise depuis dix ans pour ma retraite allemande.

Les expatriés sont aussi dans une vision temporaire de leur installation, ils s’installent dans le pays pour une durée plus ou moins longue mais envisagent ensuite une autre expatriation ou la réinstallation en France avec une belle évolution de carrière. Ils sont, souvent, tous les deux français dans le couple ou alors l’autre nationalité n’est pas celle du pays de l’expatriation. Je suis intégrée dans la communauté française et pour moi, les expatriés, sont les couples qui viennent avec un contrat de trois ans (renouvelable) et qui n’envisagent pas de façon définitive leur installation en Allemagne. C’est d’ailleurs douloureux d’être celle qui reste quand ses amies partent en France ou ailleurs, c’est dur de voir partir les personnes que l’on apprécie.

Suis-je une migrante ?

D’après le site de l’ONU « Réfugiés et migrants« , « il n’existe pas de définition juridiquement reconnue du terme « migrant ». Toutefois, selon les Nations Unies, ce terme désigne « toute personne qui a résidé dans un pays étranger pendant plus d’une année, quelles que soient les causes, volontaires ou involontaires, du mouvement, et quels que soient les moyens, réguliers ou irréguliers, utilisés pour migrer ». Cependant, il est courant d’y inclure certaines catégories de migrants de courte durée, tels que les travailleurs agricoles saisonniers qui se déplacent à l’époque des semis ou des récoltes. »

Ma situation correspond tout à fait à cette définition. Je réside depuis plus d’une année de façon volontaire dans un autre pays où j’ai émigré régulièrement. Cependant, la définition n’intègre pas les préjugés liés à l’emploi de ce mot. Le migrant est certes installé depuis plus d’une année, mais dans l’acceptation populaire du mot, il vient d’un pays du sud et a quitté son pays natal dans l’espoir d’une vie meilleure.

Française, parlant couramment allemand, ayant fait des études universitaires et exerçant une profession avec un statut de cadre, personne ne me voit comme une migrante. J’avais d’ailleurs eu confirmation avec mon ancienne chef. Lors de l’entretien annuel, elle m’avait demandé quelle évolution professionnelle pourrait m’intéresser et j’avais suggéré de travailler davantage avec un public migrant, étant moi-même concernée personnellement par un certain nombre des problématiques. Ma chef avait été surprise et m’avait dit qu’en effet, elle ne me considérait absolument pas comme une migrante et n’avait jamais envisagé que je puisse être associée à ce statut.

Mais alors que suis-je ?

Dans l’acceptation populaire du terme, je ne suis donc ni une expatriée, ni une migrante. Mis à part les difficultés liées au fait de m’exprimer en permanence, de travailler et de gérer le quotidien dans une langue étrangère, il n’y a pas vraiment de différence entre mon statut et celui d’une Allemande. Si je prenais la nationalité allemande, la seule différence immédiatement visible est que j’aurais le droit de voter à toutes les élections et pas seulement à celles réservées aux citoyens européens.

Le terme le plus adapté pour caractériser ma situation est « résidente ». Ainsi, selon la définition de l’INSEE, les résidents sont « Personnes physiques : les personnes, quelle que soit leur nationalité, qui ont leur domicile principal en France, à l’exception des fonctionnaires et militaires étrangers en poste en France qui sont non-résidents quelle que soit la durée de leur mission ; les fonctionnaires et militaires français en poste à l’étranger ; les fonctionnaires français mis à la disposition d’une organisation internationale ou de tout autre employeur non-résident. »

Ce n’est pas un terme employé couramment. Moi-même, je ne l’emploie que rarement mais il correspond à ce que je ressens. Au fait d’être installée en Allemagne, d’y résider, d’être attachée et liée à ce pays mais tout en gardant l’espoir de revenir un jour en France.

Autres participations :

Angélique au Sénégal

Eva au Japon

Lucie en Italie

Alexienne au Royaume-Uni

Kenza au Canada