Nous sommes aujourd’hui le 9 novembre, une date cruciale dans l’histoire contemporaine de l’Allemagne. En effet, le 9 novembre 1989, le mur de Berlin tombait. Un événement qui allait changer le cours de l’histoire mondiale ! Pourtant, le 9 novembre n’est pas un jour férié en Allemagne. C’est le 3 octobre, la journée de l’Unité allemande, qui l’est. Pourquoi ? Parce que le 9 novembre est aussi bien autre chose, c’est le Schicksaltag, le « jour du destin » des Allemands. J’ai expliqué cette expression dans mon article sur le 3 octobre et le 9 novembre. Aujourd’hui, je voulais parler de la construction de ce mur, dénommé officiellement l’Antifaschistischer Schutzwall (« le mur de protection anti-fasciste ») en RDA et surnommé le « mur de la honte » dans le bloc occidental.

En 1945, l’Allemagne vaincue a été divisée en quatre zones d’occupation (soviétique, américaine, britannique et française) et Berlin est divisée en quatre secteurs. La situation des secteurs américain, britannique et français se complique au fur et à mesure des crises de la guerre froide. Ces trois secteurs forment une île isolée dans la zone soviétique d’occupation (qui deviendra en 1949 la République Démocratique Allemande). Staline veut se débarrasser de cette enclave et bloque Berlin-Ouest le 24 juin 1948. Pendant presque un an, le bras de fer se poursuit entre les anciens Alliés. Puis, Staline cède.

Article sur le blocus de Berlin-Ouest (1948-1949)

Article sur le 17 juin, la fête nationale allemande oubliée

Mais Berlin-Ouest reste le moyen le plus simple de fuir la RDA. Entre 1945 et 1961, plus de 2,5 millions d’Allemands de l’Est fuient ainsi leur pays. Ce sont principalement de jeunes hommes et femmes qui partent, ce qui est problématique d’un point de vue idéologique et économique pour la RDA. Des rumeurs de construction d’un mur se répandent au printemps 1961. Le 15 juin 1961, Walter Ulbricht, le chef d’Etat de la RDA, annonce lors d’une conférence de presse à Berlin-Est que « niemand hat die Absicht, eine Mauer zu errichten » (personne n’a l’intention de construire un mur »).

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Le 3 août 1961, Khrouchtchev (le dirigeant de l’URSS) autorise Ulbricht à fermer la frontière entre la RDA et Berlin-Ouest et donc à encercler Berlin-Ouest d’un mur. C’est une défaite pour le pouvoir soviétique qui doit admettre le maintien des troupes alliées à Berlin-Ouest et de son statut particulier.

Dans la nuit du 12 au 13 août 1961, les premiers fils barbelés sont déroulés aux frontières de Berlin-Ouest. Les Berlinois se réveillent séparés et face à une frontière extrêmement surveillée. La Volksarmee (armée de la RDA) et la Volkspolizei (police de la RDA) sont appelées pour surveiller la population et les ouvriers. Rapidement, un mur complète les barbelés et les lignes de métro traversant Berlin sont coupées.

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Le 15 août 1961 a lieu la première tentative officielle de fuir Berlin-Est malgré le mur. Conrad Schumann a 19 ans, il est policier, sa brigade de Dresde a été envoyée en urgence à Berlin-Est. Depuis deux jours, la tension est palpable et les policiers sont debout pendant des heures à observer et surveiller cette frontière. Il est en poste à l’angle des rues Bernauer Straße et Ruppiner Straße, à la frontière entre le secteur français et le secteur soviétique. Ses deux autres camarades s’éloignent, il prend son élan et saute au-dessus des fils barbelés, rejoignant ainsi Berlin-Ouest et la RFA.

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Son statut de policier de la RDA en fait une icône pour la propagande occidentale tandis que l’on tait son nom dans le petit village saxon dont il est originaire. Pour la petite histoire, c’est le jeune photographe Peter Leibing (20 ans) qui a, le seul, pris cette photographie au moment parfait. Son expérience de photographe au tournoi d’équitation et de saut d’obstacles de Hambourg lui a permis d’apprendre quand appuyer sur le déclencheur pour faire la meilleure photographie de saut. Schumann vivra ensuite en Bavière, cherchant l’anonymat. Il rencontrera son photographe en 1986 et les deux deviendront de proches amis.

Tous n’eurent pas sa chance puisqu’au moins 140 personnes seront tuées lors de leur tentative de passer le mur de Berlin. Le jeune Peter Fechter sera touché par un tir le 17 août 1962 et laissé agonisant malgré ses appels à l’aide, les policiers de Berlin-Ouest ne pouvant pas intervenir car il était encore sur le territoire de Berlin-Est.

Plus d’informations sur le mur de Berlin : le mémorial du mur de Berlin

Photographie de couverture : le mémorial du mur de Berlin situé Bernauer Straße, à Berlin