Quand j’ai lu l’article de Charlotte d’Entre les cailloux sur une amitié brisée, j’ai tout de suite pensé à cette amitié qui s’est arrêtée sans que je comprenne pourquoi et à laquelle je repense souvent.

J’ai rencontré C. en licence d’histoire de l’art à Paris. J’arrivais de Poitiers, elle arrivait d’une autre université et nous ne connaissions personne dans notre nouvelle université. Nous avions toutes les deux choisi le cours sur la peinture religieuse en France au XVIIe siècle (c’est précis, ça ne sonne pas forcément très palpitant mais en vrai, c’était passionnant) et nous sommes très vite devenues amies.

Elle m’aidait à rattraper les 10-15 minutes de notes qu’il me manquait à chaque cours car je m’endormais systématiquement. Une salle plongée dans l’obscurité pour regarder les diapositives (oui, j’ai eu ma licence au siècle dernier) avec juste des petites lampes sur les tables et un enseignant à la voix monocorde me mettait toujours dans de bonnes dispositions pour faire une sieste ! Nous nous retrouvions dans Paris pour faire des expos, aller boire un café, se promener, se raconter nos vies, etc.

Nous venions toutes deux d’un milieu populaire et avions la même vision de la vie et de l’argent. La licence obtenue, nous nous sommes dirigées vers des branches professionnelles différentes mais nous avons continué à nous voir régulièrement, à déjeuner ensemble, à nous retrouver à des fêtes ou même à Berlin où j’ai vécu pendant une dizaine de mois.

Elle était déjà en couple quand nous nous sommes rencontrées et j’ai suivi leur installation ensemble, les difficultés avec ses beaux-parents, leurs déménagements (et participé à l’emballage, au portage et au déballage des cartons). Je me suis tout de suite bien entendue avec son amoureux malgré nos divergences politiques sur lesquelles, malgré tout, nous plaisantions beaucoup. J’ai assisté à leur mariage et me suis réjouie de l’arrivée de leurs deux enfants, même si, il est vrai, n’étant pas maman à ce moment-là, j’ai moins compris le chamboulement qu’elle vivait.

Puis, j’ai rencontré mon Allemand et assez vite je suis partie m’installer dans le Grand Nord avec lui. Nous avons eu notre fils puis notre fille et notre relation amicale avec C. se maintenait sans problème. Nous avions toujours plaisir à nous revoir, en France ou à Hambourg où ils sont venus me rendre visite. Je suis allée les voir chez eux, en région parisienne, un week-end prolongé, seule avec mes deux enfants et j’ai compris chez eux que j’étais vraisemblablement enceinte de la petite. C’était il y a trois ans.

Ma grossesse se passait bien, nous nous sommes encore appelées quelques fois et puis, j’ai commencé à remarquer que je n’avais plus de réponse à mes messages. J’ai envoyé une photo de ma cadette portant le t-shirt qu’elle lui avait offert. Aucune réponse ! Étrange mais j’étais à quelques jours de mon terme et ai oublié de m’en préoccuper. A la naissance, je lui ai écrit pour lui annoncer l’arrivée de notre petite mais nous avons été emportés par les problèmes de santé de la petite, son hospitalisation, les premiers rendez-vous médicaux, etc. et je n’ai plus pensé à lui écrire ou à vérifier si elle m’avait répondu.

Au bout de quelques semaines, j’ai quand même remarqué que je n’avais eu aucune réaction de sa part pour la naissance de la petite. J’ai essayé de la joindre sur son fixe, sur son portable, de lui envoyer un mail sur son adresse perso et pro ! Aucune réponse !

Je me suis réellement inquiétée, j’ai eu peur qu’elle ne soit gravement malade, voire décédée. J’ai essayé de voir sur Google s’il y avait des traces d’elle et n’ai rien trouvé ! J’ai fini par fouiller ma vieille boîte mail et ai retrouvé l’adresse e-mail de sa sœur à qui j’ai écrit pour lui dire que je n’arrivais plus à joindre mon amie.

Le lendemain, j’avais une réponse de C. me disant qu’elle ne voulait plus aucun contact avec moi et qu’elle pensait que je l’aurais compris par son silence. Je n’ai pas eu plus d’explications.

Je ne sais pas ce qui s’est passé et je pense que c’est cette absence d’explications qui m’a fait le plus mal. J’ai dû la blesser, j’ai été probablement maladroite mais nous étions amies depuis dix ans et je n’imaginais pas une seule seconde qu’elle mettrait fin à notre amitié sans m’en dire la cause. Je n’ai pas pu m’expliquer ni m’excuser.

Trois ans plus tard, je pense encore souvent à ces dix ans d’amitié, à nos fous-rires, à nos coups de cœur artistiques, à nos balades, etc. Je ne sais pas si je la recontacterai un jour ou si elle me recontactera mais j’ai l’impression que ce n’est pas encore le bon moment.

Avez-vous déjà vécu une expérience semblable ?